SG-Création - jeux - mathématiques - nouvelles - envies - vincent everaert
De quoi s'agit-il ?
La mécanique de la forteresse est simple :
- deux ou plusieurs camps combattent sur un plateau
- chacun est protégé par un mur neutre (la forteresse) que les joueurs peuvent détruire/construire/déplacer
- les joueurs doivent envahir la forteresse adverse pour en capturer le monarque.
Et c'est justement ce que nous propose Arkantar, le second jeu d'Aurélien Benhamou distribué par Paille Editions, dans une édition de belle qualité réalisée par Arborel. Le prix, aux alentours de 25 € est plus que raisonnable, à l'heure où l'on n'hésite plus à nous vendre 20 € une figurine peinte ou un simple jeu de cartes !
L'objet de cet article n'est pas de vous apprendre à jouer à Arkantar, aussi pour les règles complètes, cliquez sur ce lien.
En quelques mots :
A son tour chaque joueur peut détruire ou construire une case Mur.
A son tour chaque joueur peut déplacer l'une de ses pièces, à la manière d'une Tour aux échecs (mais une Tour qui doit se déplacer aussi loin que possible). Et éventuellement faire une capture.
S'ajoutent à cela deux particularités :
La capture avec sa pièce principale (la Reine) permet de récupérer une pièce capturée précédemment par l'adversaire.
Mais surtout : chacun dispose de 3 points d'action par tour de jeu.
- Construire : 1 point
- Détruire : 1 point
- Déplacer : 1 point
La forteresse est donc fragile et les mouvements puissants (une même pièce peut se déplacer 3 fois de suite ou l'on peut combiner le déplacement "simultané" de plusieurs pièces).
Toute la richesse du jeu est là... C'est aussi là que se tient sa relative difficulté de prise en main tactique et stratégique !
Enfin, la règle précise que les actions de construction/destruction doivent être réalisées avant les mouvements. Il me semble qu'une fois le jeu bien assimilé, il sera intéressant de lever cette restriction pour mener des combats encore plus sauvages. On pourra aussi tenter de lever d'autres interdits, comme : la prise d'une pièce met immédiatement fin au tour d'un joueur.
Arkantar, c'est surtout pour moi l'occasion de parler de cette toute petite famille que constituent les jeux de forteresse. Des jeux abstraits, qui ressemblent vaguement aux échecs, on en trouve des centaines, des milliers...
Mais, croyez-le ou non, des jeux de forteresse, il n'y en a pas ou presque ! (N'hésitez pas à me donner tort en commentaire, j'aime apprendre !)
Pourquoi ? Sans doute parce qu'il est difficile, très difficile de régler ce genre de jeu et de trouver le juste équilibre entre des murs trop friables et une citadelle imprenable.
On peut d'ailleurs estimer que les pierres d'Arkantar sont un peu trop friables et que la partie s'achève trop rapidement. Le jeu est tranchant, l'erreur sévèrement réprimandée. Mais ce que certains verront comme un défaut peut aussi être perçu comme une qualité. Et rien ne vous empêche de jouer solide en privilégiant la construction de murs avant de vous lancer à l'assaut. A vous de vous faire votre opinion à ce sujet.
Laissez-moi plutôt vous présenter deux de ces rares jeux de forteresse, issus du cerveau bouillonnant d'un créateur épatant et original (car il n'est pas simple d'avoir des idées simples !). Tellement original qu'il n'a, à ma connaissance, jamais fait éditer la moindre de ses oeuvres... Que je vous invite d'ailleurs à découvrir au-delà des deux suivantes).
Dans Hobbes, chaque joueur possède une et une seule pièce, son Souverain.
Voici ce qu'en dit Dan :
Hobbes is named after Thomas Hobbes, a 17th-century British philosopher who argued that power naturally gravitates to a single absolute monarch.
La configuration initiale dépend de la taille de plateau choisie (5*5, 7*7 ou 9*9) ainsi que du nombre de joueurs (2 ou 4).
Les deux Souverains sont séparés par des pièces neutres - les soldats - qui ne peuvent se déplacer "par eux-mêmes".
A l'instar des murs d'Arkantar, elles séparent le terrain en Royaumes distincts.
Tour à tour chaque joueur déplace son Souverain.
Le Souverain se déplace librement vers n'importe quelle case vide de son royaume (ou occupée par le Souverain adverse, ce qui marquerait la fin de la partie) et termine son mouvement en poussant ou en tirant avec lui un et un seul soldat d'autant de cases vides qu'il le souhaite (mais dans la direction de son déplacement, sans en changer, tout droit donc, à gauche, à droite, vers le haut, vers le bas, orthogonalement (vous avez compris je crois) !)
Les premiers coups d'une partie sur un plateau 5x5
Il ne manque que le but du jeu :
- réduire le royaume adverse jusqu'à immobiliser son Souverain ou
- forcer le Souverain adverse à créer une brèche dans sa forteresse (permettant alors sa capture par l'autre Souverain)
Simplissime et formidable... C'est pour ça qu'on aime les jeux abstraits, non ?
D'autant que l'on peut jouer à Hobbes avec une boîte d'Arkantar... Autre avantage des jeux abstraits !
You were supposed to dig a tunnel connecting England and France but somebody lost the map.
Now your crew is somewhere under the North Atlantic between Ireland and Iceland. The English workers (Red) blame the French and the French workers (blue) blame the English.
You have decided to settle the matter with a death match.
Il est bon ce W. D. Troyka ! J'adore.
Voici donc un plateau 11*11 ou 15*15, des ouvriers et 2 contremaîtres dans chaque camp.
Tour à tour les joueurs déplacent un ouvrier ou un contremaître.
- Dans une galerie déjà creusée, d'autant de cases que souhaité mais sans changer de direction ni passer par une case occupée -
A la fin du mouvement, on peut creuser une case de galerie supplémentaire (c'est optionnel).
Deux galeries peuvent se croiser mais, pour éviter les effondrements, il est interdit de créer deux galeries adjacentes.
Avancement d'un combat sur plateau 15x15
Peu à peu (oui, il a un petit défaut ce jeu-ci, il est un peu lent), les galeries progressent et les ouvrirers se préparent à rencontrer l'équipe adverse. Lorsque deux ouvriers se font face, ils peuvent se capturer. Un ouvrier peut aussi capturer un contremaître : le joueur qui capture un contremaître gagne immédiatement la partie.
On prépare donc des lignes d'ouvriers pour défendre ses ouvriers... Et surtout ses contremaîtres qui eux sont incapables de capturer quiconque et ne savent que fuir.
La partie s'achève alors à la manière d'un Pacman dans lequel les fantômes creuseraient leur propre tombe. (je sais, elle est étrange cette phrase)
Il est difficile de jouer à Tunneler avec le matériel d'Arkantar (parce qu'il vous faudrait en acheter 5 boîtes).
Le mieux est un plateau de Go d'initiation 15x15 et quelques Meeples.
Vous pouvez cependant en jouer une version "découverte" avec la configuration suivante :
si Arkantar n'a pas tout inventé, il est l'un des dignes représentants d'une bien courte lignée de jeux où le plateau décide des mouvements possibles et où il faut donc modifier le plateau pour prendre l'avantage sur son adversaire. Un peu moins élégant et plus long qu'un Hobbes mais plus et moins qu'un Tunneler.
Malgré (ou à cause de) la courte durée d'une partie, je ne le conseillerais pas à un débutant en jeux abstraits. Son côté brutal peut apparaître frustrant, peu contrôlable et rebuter un novice... Le jeu est cependant excellent pour qui accepte de prendre le temps de réfléchir sur la partie, de prendre le temps de progresser au fil des parties ; la marque des bons jeux de réflexion et celui-ci est très bon.
Une petite perle (de plus) dans la collection du Megalow Blog !